I. Un jour j’ai rêvé d’être toi

Le dossier

  • Conception et jeu : Anaïs Muller & Bertrand Poncet
  • Direction d’acteur : Pier Lamandé
  • Création lumière : Diane Guerin
  • Musique : Kevin Norwood

Synopsis

Pour contrer la solitude et l’ennui, Bert et Ange jouent la comédie, s’amusent, se font répéter et se mettent en scène. Bert est un homme qui voudrait être une femme, Ange est une actrice en mal de reconnaissance. On comprend que, petit à petit leurs rêves se sont fanés, les illusions envolées, mais que seul reste intacte la nécessité de s’aimer. Un jour j’ai rêvé d’être toi, c’est l’idée qu’on rêve tous d’être un autre, qu’on a tous des fantasmes, des rêves et qu’ils sont éphémères parce qu’ « un jour », à un moment précis j’ai rêvé.
A l’image de notre société narcissique où le selfie est devenu plus qu’un réflexe un art de vivre, Ange et Bert victimes de leur égocentrisme se perdent et se ridiculisent.

Texte

Ange (en rigolant) : Il m’a même pas reconnu, j’ai aucune présence.
Bert : On est nuls.
Ange : Non mais c’est que j’ai aucune présence… Il m’a même pas reconnu.
Bert : Personne ne me reconnaît. Personne me connaît.
Ange : Ou alors, il m’a reconnu mais il ne m’aime pas
Bert : Non, il t’a pas reconnu, il a même pas fait attention. Je crois même pas qu’il ta regardé.
Ange : Quoi?
Bert : Je crois même pas qu’il t’a regardé.
Ange : Bah si il m’a serré la main.
Bert : Ah oui, il t’a serré la main ?
Ange : Ouais
Bert : Moi j’avais l’impression de voir un fou. J’ai cru voir un fou, il était… il était ivre de son succès. Et il répondait automatiquement à notre bravo.
Ange : C’est possible.

Nous aimons jouer avec les codes de la représentation, et troubler le spectateur au point qu’il ne sache plus si ce qu’il regarde est vrai ou faux, à savoir si Bert n’est pas réellement Bertrand, et Ange Anais. Les codes sont brouillés mêlant la rêverie et la comédie à l’expérience vécue. Com- ment résister, comment survivre et appréhender la mort inéluctable? Comment sourire face à la mort? Transformer la mélancolie par le courage, le désespoir par l’espoir, le scepticisme par la foi et l’orgueil par la modestie. Pour nous, la vie est tendue constamment vers la comédie, elle s’accompagne d’un conflit permanent entre la conscience de la précarité de l’être au monde, de la fragilité du bonheur, et la certitude d’exister que procure la création qui l’emporte sur la dépossession et la mort.

« Il n’y aura eu entre nous qu’harmonie, sensiblerie même peut-être. C’était plus que cela. Une manière particulière de se compléter, comme deux miroirs se renvoient la même image plus en plus pressante. Et la nature était de la partie autant que nous. »
L’homme sans qualités, Robert Musil